Fin de l’enquête disciplinaire concernant le procureur général Michael Lauber

3001 Berne, 04.03.2020 - Berne, le 4 mars 2020. L’autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération (AS-MPC) a clos l’enquête disciplinaire concernant le procureur général Michael Lauber. L’AS-MPC est arrivée à la conclusion que le procureur général a contrevenu à plusieurs devoirs de fonction. À plusieurs reprises, il n’a pas dit la vérité, a agi de manière déloyale, a violé le Code de conduite du Ministère public de la Confédération et a entravé l’enquête de l’AS-MPC. En outre, le procureur général ne voit pas en quoi ses agissements sont problématiques et fait preuve d’une mauvaise compréhension de sa profession. La somme des manquements à ses obligations est conséquente. L’AS-MPC lui inflige une réduction de salaire de 8 % pour une durée d’un an au titre de sanction disciplinaire.

Le 9 mai 2019, l’AS-MPC a décidé d’ouvrir une enquête disciplinaire concernant le procureur général. Suite à la décision du Tribunal administratif fédéral n’autorisant pas l’AS-MPC à déléguer l’enquête à des spécialistes externes, cette dernière a été menée par la juge fédérale Alexia Heine, Dr en droit, membre de l’AS-MPC. Comme le prévoit la loi, après l’adoption de son projet de décision, l’AS-MPC a accordé au procureur général le droit d’être entendu.

L’enquête a montré que le procureur général a manqué à plusieurs reprises, et parfois de manière substantielle, à ses devoirs. L’AS-MPC a constaté, sur le plan disciplinaire, les violations suivantes des devoirs de fonction:

• À plusieurs reprises, le procureur général n’a pas dit la vérité à l’AS-MPC, au Parlement et au public au sujet de sa rencontre du 16 juin 2017 avec le président de la FIFA Gianni Infantino. Il a été prouvé que cette rencontre a eu lieu.

• Le procureur général a négligé de protocoler ses trois rencontres avérées avec le président de la FIFA Gianni Infantino, en violation de l’art. 76 f du code de procédure pénale.

• Une tierce personne était présente lors des rencontres du 22 mars 2016 et du 16 juin 2017 entre le procureur général et le président de la FIFA. Des sujets pertinents pour la procédure ont été abordés à ces occasions, créant un risque de violation du secret de fonction.

• En s’impliquant d’une manière inadaptée à sa fonction dans les procédures s’inscrivant dans le cadre du complexe de procédures de la FIFA, le procureur général a enfreint l’art. 9 de la loi sur l’organisation des autorités pénales, selon lequel il est tenu de veiller à une affectation efficace des ressources humaines, des moyens financiers et de l’infrastructure du Ministère public de la Confédération.

• Comme tous les employés du service public, le procureur général est soumis à un devoir de fidélité qui comprend également l’obligation d’agir de manière loyale. À la suite de l’ouverture d’une procédure disciplinaire à son encontre, le procureur général a enfreint cette obligation en jetant publiquement le discrédit sur l’AS-MPC, son autorité directe de surveillance.

• Le procureur général a entravé l’enquête de l’AS-MPC en influençant personnellement et directement le traitement des demandes de renseignements et de production de documents de l’AS-MPC au sein du Ministère public de la Confédération, et en s’assurant que certaines de ces demandes soient rejetées et retardées de manière illicite. Sans en informer l’AS-MPC, il a personnellement, avant leur audition, accordé des autorisations illicites à témoigner aux personnes appelées à donner des informations à l’AS-MPC, en décrivant les sujets sur lesquels elles étaient autorisées à répondre aux questions de l’AS-MPC. Le procureur général a en outre offert à ces personnes l’assistance de défenseurs aux frais du Ministère public de la Confédération, les mettant en situation de conflit de loyauté. Le procureur général a ensuite ordonné personnellement la prise en charge des coûts de ses propres défenseurs par le Ministère public de la Confédération. Ce faisant, il a contrevenu au Code de conduite du Ministère public de la Confédération (interdiction d’activité en cas de conflit d’intérêts).

Le procureur général n’a délibérément et en toute connaissance de cause pas dit la vérité au sujet de la rencontre du 16 juin 2017 avec le président de la FIFA. Les actes déloyaux du procureur général, la violation du devoir de fidélité, l’entrave à l’enquête de l’AS-MPC que constituent les autorisations à témoigner qu’il a accordées à des subordonnés, le refus de remettre des documents ainsi que la violation du Code de conduite (interdiction d’activité en cas de conflit d’intérêts) constituent de graves manquements.

Le procureur général a fait preuve de négligence en ne consignant pas les rencontres avérées avec le président de la FIFA, ainsi qu’en créant un risque de violation du secret de fonction. Vu la recommandation adressée par l’AS-MPC au procureur général le 22 novembre 2018 de consigner par écrit les discussions avec les parties, qui selon ses dires a été mise en vigueur pour ce qui le concerne, l’absence de procès-verbal ne peut lui être imputée sur le plan disciplinaire. La création d’un risque de violation du secret de fonction ainsi que l’infraction à l’art. 9 de la loi sur l’organisation des autorités pénales doivent être considérées comme en partie prescrites sur la base de l’art. 18 al. 1 de l’ordonnance de l’Assemblée fédérale concernant l’organisation et les tâches de l’autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération.

L’ampleur des manquements aux obligations ainsi que la gravité de la faute doivent être prises en compte dans la détermination de la sanction. Ce faisant, l’autorité de surveillance estime que, parmi les violations relevées, le comportement déloyal et les fausses déclarations sont les plus importantes. L’AS-MPC a en outre tenu compte du fait que de graves manquements aux obligations sont également survenus au cours de l’enquête disciplinaire.

Pour les raisons susmentionnées, l’AS-MPC sanctionne les présents manquements aux obligations du procureur général par une réduction de salaire de 8 % pour une durée d’un an. La réduction de salaire maximale possible s’élève à 10 %. Le fait que les documents à disposition ne comprennent aucune mention indiquant que le procureur général aurait reçu des prestations financières, du matériel ou des services personnels illégaux, est pris en compte au titre de facteur atténuant.

Le procureur général peut déposer un recours contre la décision de l’AS-MPC auprès du Tribunal administratif fédéral dans un délai de 30 jours.

À propos de l’AS-MPC :
Autorité collégiale indépendante, l’autorité de surveillance du Ministère public de la Confédération (AS-MPC) réunit sept membres élus par l’Assemblée fédérale (Chambres réunies) pour une durée de quatre ans. Conformément à la loi, l’AS-MPC se compose d’une juge fédérale, d’un juge pénal fédéral, de deux avocats et de trois spécialistes. Les membres de l’AS-MPC sont soutenus dans leurs activités par un secrétariat permanent.


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