Initiative de mise en œuvre : rejet et nullité partielle

Berne, 20.11.2013 - Dans le message qu’il a adopté aujourd’hui à l’adresse du Parlement, le Conseil fédéral recommande le rejet de l’initiative populaire "Pour le renvoi effectif des étrangers criminels" – dite initiative de mise en œuvre – au motif qu’elle est incompatible avec des principes essentiels de l’État de droit. Il estime en outre qu’elle n’est pas nécessaire pour mettre en œuvre les dispositions constitutionnelles sur le renvoi, rappelant qu’il a soumis en juin dernier au Parlement un projet de compromis qui résout les problèmes d’application posés par l’initiative de mise en œuvre. Le Conseil fédéral considère enfin que la définition restrictive que l’initiative donne du droit international impératif justifie de la déclarer partiellement nulle et de la soumettre au vote du peuple et des cantons sans cette disposition problématique.

Le 28 décembre 2012, l'UDC déposait auprès de la Chancellerie fédérale l'initiative populaire "Pour le renvoi effectif des étrangers criminels (initiative de mise en œuvre)", munie de 155 788 signatures valables. Cette initiative a pour but d'inscrire dans la constitution des dispositions directement applicables pour mettre en œuvre l'initiative sur le renvoi adoptée le 28 novembre 2010. Une telle mesure aurait pour conséquence que les étrangers condamnés pour certaines infractions seraient expulsés du pays et frappés d'une interdiction d'entrée en Suisse de cinq à quinze ans (vingt ans en cas de récidive), indépendamment de la sévérité de la sanction. Ils perdraient en outre tout droit de séjourner et de pénétrer à nouveau en Suisse pendant cette période.

La mise en œuvre de l'initiative sur le renvoi en bonne voie

Comme le constate le Conseil fédéral dans son message, l'automatisme de l'expulsion prévu par l'initiative de mise en œuvre est contraire à plusieurs principes fondamentaux de l'Etat de droit et au droit international. Le gouvernement rappelle qu'il a présenté au Parlement, le 26 juin 2013, un projet de compromis pour mettre en œuvre les dispositions constitutionnelles sur le renvoi qui tient compte dans une large mesure aussi bien du mécanisme d'expulsion approuvé par le souverain que du principe de la proportionnalité et des droits garantis par les droits de l'homme. Les travaux suivent leur cours : c'est à présent au Parlement qu'il revient d'adopter les modifications législatives requises. Il dispose pour ce faire de près de deux ans et demi. Pour rappel, les dispositions constitutionnelles prévoient un délai de cinq ans à cet effet.

L'initiative viole les principes de l'Etat de droit

L'initiative de mise en œuvre admet des entorses au principe de la proportionnalité, inscrit dans la Constitution: il ne sera pratiquement plus possible, au moment où l'expulsion sera prononcée ou sur le point d'être exécutée, de vérifier si une telle mesure est, dans le cas concret, appropriée, nécessaire et raisonnablement exigible. En raison de son hétérogénéité, la liste des infractions pourra en outre entraîner l'expulsion de personnes ayant commis une infraction sanctionnée par une peine légère.

La disposition constitutionnelle proposée reconnaît explicitement la primauté des nouvelles normes sur le doit international non impératif. Les conflits de normes sont donc programmés. Une adoption de l'initiative empêcherait une mise en œuvre de l'initiative sur le renvoi qui respecte, dans la mesure du possible, le droit international. Il en résulterait de nombreuses violations de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (Pacte II de l'ONU), de la Convention relative aux droits de l'enfant, de l'Accord sur la libre circulation entre la Suisse et l'UE (ALCP) et de la Convention instituant l'Association européenne de Libre-Echange (Convention AELE).

Nullité partielle en raison d'une définition restrictive du droit international impératif

Selon le texte de l'initiative, les normes impératives du droit international couvrent "exclusivement l'interdiction de la torture, du génocide, de la guerre d'agression, de l'esclavage ainsi que l'interdiction de refouler une personne vers un Etat où elle risque d'être torturée ou tuée". Cette définition est plus étroite que celle admise en droit international. Or la Suisse ne peut pas simplement décider de redéfinir la notion de droit international impératif. Il faut donc déclarer l'initiative populaire partiellement nulle et la soumettre au vote du peuple et des cantons sans la définition problématique.


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