Requérants d’asile mineurs non accompagnés : la CNPT est préoccupée par l’encadrement insuffisant dans les centres fédéraux

Berne, 24.04.2023 - La Commission nationale de prévention de la torture (CNPT) a visité plusieurs centres fédéraux pour requérants d’asile (CFA) entre février 2021 et octobre 2022. Elle juge préoccupante la situation des requérants d’asile mineurs non accompagnés, qui ne bénéficient pas, depuis fin février 2022, d’un encadrement suffisant dans les centres de la Confédération. Dans son rapport publié ce jour, la Commission relève aussi toute une série de bons exemples dans divers domaines examinés.

La situation dans les CFA a beaucoup changé, lors de la dernière année observée (2022), en raison de l'arrivée, depuis février 2022, de nombreuses personnes en quête de protection venant d'Ukraine et de la forte augmentation du nombre de requérants d'asile mineurs non accompagnés, principalement de sexe masculin, en provenance d'Afghanistan.

Ces évolutions se sont répercutées plus particulièrement sur la prise en charge des requérants d'asile mineurs non accompagnés. Le personnel des CFA s'est concentré sur les aspects pratiques de l'hébergement des jeunes gens et sur certaines situations urgentes (par ex. de jeunes affichant des comportements problématiques). Les équipes chargées de l'encadrement n'ont pas pu maintenir le système dans lequel des membres du personnel socio-éducatif s'occupent spécifiquement de certains jeunes en tant que personne de référence. En lieu et place, des collaboratrices et des collaborateurs socio-éducatifs s'occupaient toute la journée de près d'une centaine de jeunes, avec le soutien de quelques personnes de l'encadrement. Parmi les requérants d'asile mineurs non accompagnés, les jeunes filles sont nettement minoritaires dans les CFA. Leurs besoins spécifiques sont fréquemment négligés face au très grand nombre de jeunes garçons.

Les collaboratrices et les collaborateurs du Secrétariat d'État aux migrations (SEM) et les entreprises chargées de l'encadrement et de la sécurité ont été fortement sollicitées en raison de ces évolutions. La Commission reconnaît les efforts consentis par ces équipes dans les CFA et la lourde charge de travail qui pèse sur elles. Elle n'ignore pas non plus qu'il est très difficile de trouver suffisamment de personnel qualifié pour ces activités exigeantes.

Les équipes d'encadrement ne sont plus en mesure, dans les conditions actuelles, d'assurer de manière continue une prise en charge qui tienne compte des besoins spécifiques des mineurs non accompagnés. Martina Caroni, présidente de la CNPT, juge cette situation contraire aux dispositions de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant : elle ne respecte pas l'intérêt supérieur de l'enfant (art. 3) ni le droit de ces jeunes isolés au repos et aux loisirs et de se livrer au jeu et à des activités récréatives propres à leur âge (art. 31).

La Commission recommande au SEM et aux entreprises chargées de l'encadrement de mettre en œuvre la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et de revoir et d'adapter l'actuel système de prise en charge pour qu'un encadrement professionnel et continu de tous les jeunes soit garanti même en cas d'afflux important. Les acteurs politiques, en particulier le Conseil fédéral et le Parlement, doivent veiller à ce que les ressources nécessaires à cet effet soient disponibles. Leur responsabilité est d'autant plus grande qu'aucune évolution de la situation ne se dessine pour l'heure.

Dans son rapport, la CNPT examine également la question de la prévention de la violence, notamment sexualisée, dans les CFA, et la manière dont sont traités les signalements et les indices de violence. Sont aussi abordés les tentatives de suicide et les automutilations, les problèmes d'addictions et le recours à des mesures de sécurité, comme la contrainte physique, les rétentions de courte durée dans des locaux spécifiques (appelés salles de sécurité) et les fouilles à corps.

La Commission a aussi relevé une série de bons exemples observés dans un, parfois dans plusieurs CFA, concernant l'encadrement des requérants d'asile mineurs non accompagnés, la prévention de la violence, la prise en charge des tentatives de suicide et des cas d'automutilations, ou encore s'agissant de la préparation des repas et de la possibilité données aux résidents de conserver et de consommer leurs propres aliments.

De février 2021 à octobre 2022, la Commission nationale de prévention de la torture (CNPT) a effectué 17 visites dans des centres fédéraux pour requérants d'asile dans toute la Suisse. Les délégations se sont plus particulièrement intéressées à la situation des requérants d'asile mineurs non accompagnés. Elles se sont entretenues avec des jeunes, des hommes et des femmes hébergés dans les centres, avec des collaboratrices et des collaborateurs, avec le SEM, avec des conseillères et des conseillers juridiques, avec des enseignantes, avec des aumôniers et aumônières et avec divers spécialistes. Elles ont également analysé un grand nombre de documents et de statistiques. La Commission évalue les données recueillies lors des visites au regard des normes des droits humains et des droits fondamentaux.

 
Le rapport de la Commission est publié en allemand. Un résumé en français et en italien est aussi disponible.


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Auteur

Commission nationale de prévention de la torture
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