Acte d’accusation contre un ancien gestionnaire de fonds de prévoyance

Berne, 27.07.2022 - Berne. Le Ministère public de la Confédération (MPC) a déposé un acte d’accusation contre un ancien collaborateur du Département des finances du canton de Saint-Gall et de la Caisse de pension de Saint-Gall. Il est reproché au prévenu d'avoir porté atteinte au capital de prévoyance de ses anciens employeurs et de la Direction du fonds et de s'être enrichi illégalement en gérant des avoirs de prévoyance de manière contraire au droit et à ses obligations.

Le MPC reproche à l'ancien fonctionnaire de nationalité suisse plusieurs actes de gestion déloyale des intérêts publics (art. 314 du Code pénal suisse [CP]), plusieurs actes de gestion déloyale aggravée (art. 158 ch. 1 al. 1 + 3 CP), éventuellement plusieurs infractions à la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (art. 76 al. 6 + 7 LPP), un cas grave d'exploitation d'informations d'initiés ainsi que plusieurs tentatives d'exploitation d'informations d'initiés (art. 154 al. 1 let. a en relation avec l’al. 2 de la loi sur l'infrastructure des marchés financiers [LIMF], respectivement l’art. 40 al. 1 let. a en relation avec l’al. 2 de la loi sur les bourses [LBVM[1]]) et du blanchiment d'argent multiple (art. 305bis ch. 1 CP).

 

Faits mis en accusation

En résumé, les faits reprochés au prévenu sont les suivants : le prévenu a travaillé de 2003 à 2014 pour le Département des finances du canton de Saint-Gall et de 2014 à 2018 pour la Caisse de pension de Saint-Gall. Dans ces deux fonctions, il était responsable, en tant que gestionnaire de portefeuille, de la gestion des fonds de prévoyance du deuxième pilier des employés du canton de Saint-Gall. Sur la base d'un concept et de directives de placement, il a pu mettre en œuvre la stratégie de placement du fonds qu'il gérait sous sa propre responsabilité. Il pouvait ainsi décider de manière autonome et sans consulter d'autres services de l'augmentation et de la diminution des positions en actions, ainsi que des différents paramètres des transactions correspondantes, par exemple de leur date et de leur volume.

Selon l'acte d'accusation, de 2008 à 2018, le prévenu a, en violation de la loi et de ses obligations, coordonné ses transactions d'actions privées avec les transactions d'actions qu'il effectuait officiellement. Au moyen de ce que l'on appelle le « frontrunning », il a par exemple ouvert des positions en actions privées quelques jours avant ou le jour même de la passation d'ordres des fonds qu'il gérait. En raison de l'ordre des fonds, une variation des cours s'est alors produite, ce qui a permis au prévenu de réaliser en règle générale un bénéfice lors de la vente ultérieure des positions privées. Cette négociation concertée d'actions identiques a eu lieu dans l'intention d'exploiter des informations confidentielles à son propre avantage et de se procurer ainsi un avantage patrimonial illicite.

Par le biais de centaines de transactions pertinentes pour l'accusation, le prévenu a ainsi réalisé des gains privés d'un montant de CHF 3,116 millions, qu'il aurait dû révéler à ses anciens employeurs ainsi qu'à la Direction du fonds et qui auraient dû leur revenir.

L'accusation de blanchiment d'argent résulte du fait que le prévenu, en ne déclarant pas aux autorités fiscales les valeurs patrimoniales obtenues en violation de la loi et de ses obligations, ainsi qu'en effectuant de nombreux retraits en espèces, a rendu plus difficile la saisie, le séquestre et la confiscation de ces fonds par les autorités de poursuite pénale.

 

Nouvelle forme de collaboration entre la Confédération et les cantons

Cette accusation et la procédure pénale font suite à une plainte déposée en décembre 2017 par l'Autorité de surveillance des marchés financiers FINMA contre le prévenu auprès de l'Office d'instruction du canton de St-Gall. Comme le Ministère public de Saint-Gall voulait éviter l'apparence de toute prévention, le Ministère public lll du canton de Zurich, spécialisé dans la poursuite pénale dans le domaine de la criminalité économique, a été chargé en janvier 2018 de désigner deux procureurs extraordinaires afin de diriger la procédure pour le canton de Saint-Gall. La procédure pénale a été formellement ouverte en avril 2018.

Au cours de l'enquête, il est apparu que la procédure pourrait permettre d'obtenir une première jurisprudence sur la question, non résolue dans la doctrine et la pratique juridiques, de savoir si et dans quelle mesure le « frontrunning » doit être considéré comme un délit d'initié. Comme la poursuite et le jugement des délits d'initiés relèvent de la juridiction fédérale obligatoire, la procédure pénale a été reprise par le MPC en avril 2020. Dans un souci d'économie de procédure et afin d'éviter un retard de procédure lié à l'important travail de familiarisation avec le dossier, les procureurs chargés de la procédure ont toutefois été simultanément nommés par le MPC en tant que procureurs fédéraux extraordinaires. L'ancienne direction de la procédure a ainsi pu poursuivre la procédure sous la compétence de la Confédération. Ainsi, la procédure représente également une nouvelle forme de coordination et de collaboration dans la conduite des procédures entre les autorités de poursuite pénale de la Confédération et des cantons.      

 

Indications en rapport avec la mise en accusation

Dans son acte d’accusation, le MPC requiert une peine de quatre ans. Le prévenu bénéficie de la présomption d'innocence jusqu'à ce qu'un jugement définitif soit rendu. Une fois l'acte d’accusation déposé, le TPF est compétent pour donner des informations complémentaires.


[1] aLBVM, à partir du 01.01.2016 LIMF


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