«La sécurité de la Suisse 2020» : le Service de renseignement de la Confédération présente son rapport de situation

Berne, 27.10.2020 - La politique internationale en matière de sécurité est aujourd’hui marquée par les rivalités entre plusieurs acteurs qui veulent gagner en influence. Dans ce contexte, les capacités d'anticipation et d'identification précoce du Service de renseignement de la Confédération (SRC) jouent un rôle prépondérant, afin de déceler à temps les menaces et les évaluer, pour ensuite prendre les mesures préventives qui s’imposent. Le rapport annuel du SRC présente les principales évolutions de la situation du point de vue du renseignement.

S’il n’est actuellement pas encore possible de déterminer quels seront les impacts de la pandémie de Covid-19 sur le plan de la politique de sécurité, les observations du SRC démontrent un renforcement – et vraisemblablement une accélération – des tendances sur le plan international. La pandémie de Covid-19 fournit de nouveaux indices quant à la fin d’un ordre mondial fortement marqué par les États-Unis, leur système d’alliances, et des institutions souvent soumises à une profonde influence américaine.

Le changement actuellement observé au niveau international dans le domaine de la politique de sécurité va perdurer. La question se pose de savoir si un ordre stable va à nouveau s’établir dans un avenir proche. Un nouvel ordre bipolaire entre les États-Unis et la Chine, dont on ne distingue pour l’heure toutefois pas encore clairement les contours, pourrait se mettre en place. Une éventuelle évolution vers un système multipolaire est encore plus incertaine.

Une compétition stratégique entre les grandes puissances

La rivalité entre les États-Unis et la Chine, les efforts de la Russie visant à consolider sa zone d’influence en Europe, ainsi que divers conflits et crises aux frontières européennes marquent l’environnement stratégique de la Suisse. Les États-Unis vont certes rester, au-delà de 2020, la puissance mondiale exerçant l’influence la plus grande, mais les relations transatlantiques et la présence américaine au Proche-Orient et au Moyen-Orient vont à l’avenir perdre encore en importance. Les contradicteurs géopolitiques des États-Unis essaient d’en tirer profit et de déployer leur puissance dans les brèches ainsi créées, afin d’imposer la promotion de leurs propres intérêts.

La Chine se considère comme une grande puissance en plein essor, au même titre que les États-Unis. Le fossé entre le modèle libéral occidental et le capitalisme d’État autoritaire va encore se creuser. Les indices selon lesquels le système international pourrait de plus en plus être marqué par la concurrence stratégique entre les États-Unis et la Chine se multiplient, pouvant aller jusqu’à la mise en place de zones d’influence stratégique exclusives.

La Russie continue de chercher à agir sur un pied d’égalité avec les États-Unis et tente d'asseoir sa propre sphère d’influence. Sa politique porte ses fruits et la Russie ne compte pas s’arrêter là. L’Ukraine demeure au cœur des intérêts stratégiques russes, tout comme la Biélorussie après les manifestations consécutives aux élections présidentielles du 9 août 2020. Le Kremlin a mis en garde les États-Unis et l’Union européenne contre toute ingérence dans ce dossier. La mer Noire et la Méditerranée sont également les théâtres d’une rivalité stratégique avec d’autres acteurs. La Russie engage aussi des moyens militaires pour atteindre ses objectifs.

L'espionnage, instrument des luttes de pouvoir

L’espionnage est l’expression des tensions précédemment décrites. Les États se servent de l’espionnage comme instrument pour atteindre ou consolider une position avantageuse, voire dominante, face à des rivaux politiques, militaires ou économiques. De telles tensions se reflètent également dans les activités d’espionnage d’autres États sur sol suisse, ce qui nuit à l’image de notre pays comme État hôte de la diplomatie internationale. De plus, des intérêts suisses sont directement menacés lorsque des acteurs de l’espionnage prennent par exemple pour cibles la place commerciale et financière suisse, des entreprises innovantes ou des institutions politiques, afin d’obtenir des avantages concurrentiels et des possibilités d’influence. Certains États utilisent également l’espionnage comme instrument contre leurs propres ressortissants afin de consolider leur pouvoir, par exemple en surveillant et en intimidant des opposants à l’étranger, y compris en Suisse.

Les activités d’espionnage et, plus globalement, les luttes de pouvoir au niveau international, interviennent aussi dans l’espace cybernétique. Les infrastructures critiques de la Suisse n’ont jusqu’à présent jamais été directement visées par des actes de sabotage commandités par un État. Mais de telles attaques visent aussi des partenaires et fournisseurs suisses, et le fait qu'ils subissent des dommages est au moins un risque assumé. Les intérêts suisses peuvent donc aussi être touchés indirectement par le conflit mené dans l’espace cybernétique.

Extrémisme violent: tentatives d'instrumentalisation des manifestations

Dans le contexte du terrorisme djihadiste, l’ « État islamique » continue à donner le ton. La menace terroriste en Suisse reste élevée. De nouveaux attentats en Europe sont probables – en premier lieu des attentats inspirés par l’ « État islamique ». Aux yeux des djihadistes, la Suisse fait certes partie des cibles d’attentats légitimes, mais elle ne constitue pas une priorité.

Le potentiel de violence persiste aussi bien parmi les extrémistes de gauche que les extrémistes de droite. Au sein des milieux d’extrême gauche, les formes de violence plus graves comme les incendies intentionnels restent principalement limitées à des cibles considérées comme présentant un lien avec ce que ces milieux désignent par la « répression ». Lors de manifestations, une participation accrue à des actions violentes et une agressivité marquée, voire croissante, sont perceptibles. Les milieux d’extrême gauche tentent notamment de prendre la tête de nouveaux mouvements, comme ce fut le cas cette année lors des manifestations Black Lives Matter en Suisse, et de les instrumentaliser à leurs propres fins.

Les membres des milieux d’extrême droite font actuellement preuve de retenue vis-à-vis de l’usage de la violence, mais il convient de tenir compte d'indices faisant état d’entraînements à des sports de combat et de la possession d’armes fonctionnelles. En Suisse, le principal risque d’attaque motivée par l’extrême droite émane d’auteurs isolés partageant les convictions de ces milieux, mais qui ne sont pas membres à part entière de groupes extrémistes violents établis.


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