Des transistors fraîchement imprimés

Dübendorf, St. Gallen und Thun, 10.09.2020 - Une révolution est en cours dans la fabrication des circuits électroniques: l’impression directe de composants et circuits sur papier, films de plastique ou autres substrats. Des chercheurs de l’Empa y travaillent. Il leur reste toutefois quelques obstacles à surmonter.

Pourquoi ne pas simplement imprimer les circuits électroniques sur le support de son choix? Cela ne relève plus de l’utopie. L’électronique imprimée est une technologie en plein boom avec ses encres et presses spécialisées permettant de déposer des circuits sur différents substrats. Il ne s’agit pas d’un marché de niche: un récent rapport de l’association professionnelle de l’électronique organique et imprimée (OE-A) indique que le marché mondial du secteur dépasse déjà 35 milliards de dollars et lui prédit une croissance vigoureuse toutes ces prochaines années. En électronique classique, la phase de fabrication n’est pas une mince affaire et nécessite des équipements très coûteux. L’internet des objets a besoin d’une nouvelle sorte d’électronique: les circuits ne doivent plus forcément être minuscules et ultra- rapides, mais avant tout bon marché, simples à produire et applicables sur des substrats souples. On connait déjà les RFID intégrés aux emballages. On peut maintenant envisager toute une variété d’applications telles que, par exemple, des capteurs simples sur l’emballage de produits laitiers signalant les ruptures de la chaîne du froid. Des transistors sur papier Les équipes de Jakob Heier, du laboratoire Polymères fonctionnels et de Yaroslav Romanyuk, du laboratoire Films minces et photovoltaïque, travaillent à cette technologie de concert avec des chercheurs de l’Institut Paul Scherrer et de l’EPFL de Lausanne. C’est le projet FOXIP: Functional OXIdes Printed on Polymers and Paper. Leur objectif est d’imprimer des transistors en couches minces sur du papier et des feuilles de PET au moyen de techniques d’impression adaptées à la production industrielle. Ils recourent pour cela à des encres chargées de minuscules particules d’oxyde de métal. Elles sont appliquées sur un substrat par impression-contact ou par jet d’encre. «Il ne s’agit évidemment pas d’imprimantes de bureau mais d’appareils conçus spécialement pour cette tâche», explique Romanyuk. Ces imprimantes sont installées au Coating Competence Center de l’Empa (voir l’encadré). L’impression de circuits fiables sur des supports flexibles implique la résolution préalable d’une série de problèmes délicats tels que l’optimisation du support, la composition de l’encre, l’exactitude de la technique d’impression ou un mode de durcissement thermique des couches n’endommageant par la feuille imprimée. Commençons par le support. Souvent flexible – par exemple en papier ou en plastique – sa surface n’est pas aussi idéalement lisse que les galettes de silicium utilisées dans la fabrica-tion des composants électroniques habituels. Réaliser des circuits précis s’avère donc délicat. Actuellement, les composants imprimés ont environ 1000 fois la taille de leurs équivalents microélectroniques. «Ce qui n’est pas pour autant énorme: nos tolérances à l’impression sont de l’ordre de dix micromètres, soit moins que l’épaisseur d’un cheveu», précise Heier. Formé à partir de l'encre Autre défi: comment conditionner sous forme d’encre les matériaux conducteurs, semiconducteurs et isolants nécessaires à la réalisation des circuits? Et comment, après l’impression, être certain que la matière ne se fragmente pas et conserve ses propriétés? Jakob Heier s’est attaché à la confection de ces encres spéciales. Une encre se compose de fines particules du matériau fonctionnel en suspension dans un solvant volatil. Il est souvent nécessaire d’y inclure des liants et des additifs pour en garantir la stabilité et la rendre propre à l’impression. Ces compléments font toutefois problème parce que leur présence après l’impression parasite le fonctionnement des circuits. Il s’agit donc de les calciner. Cela suppose de fortes températures qui, à leur tour, peuvent endommager le substrat synthétique ou en papier. Heier et son équipe ont choisi de concocter une encre d’impression de couches de graphène, composée uniquement de particules de graphène et d’un solvant, libre de tout additif devant ensuite être éliminé. Les couches obtenues par impression doivent être assez résilientes pour conserver leurs caractéristiques conductrices lors-qu’elles sont voilées ou tordues avec leur support. «Si ça marche, nous aurons surmonté un obstacle: plus besoin de traitement post-impression à haute température», explique Heier. De l'encre à l'électronique Les choses se présentent différemment avec les encres de nanoparticules d’oxydes de métaux. On les soumet à un frittage, c’est-à-dire un traitement thermique fusionnant les nanoparticules entre elles pour former une couche fonctionnelle. Mais le papier et les films utilisés sont très sensibles à la température. L’idéal serait de ne chauffer que les couche d’oxydes de métaux en maintenant le substrat froid. «C’est possible», explique Romanyuk; par frittage flash (flash sintering), soit la cuisson de la couche imprimée par éclairs ultra brefs ne laissant pas au substrat le temps de chauffer. Les matériaux à base d’oxydes de métaux sont appelés à jouer un rôle important en électronique imprimée. Ils existent sous forme de conducteurs, semiconducteurs ou isolants. Leurs électrons sont plus mobiles que ceux des encres organiques, ce qui permet d’augmenter la puissance des circuits. Ils sont aussi plus résistants à l’air. «L’oxyde d’indium-étain est particulièrement intéressant car il est à la fois excellent conducteur et transparent», signale Romanyuk. Son équipe a récemment réussi à imprimer un transistor à effet de champ par imprimante à jet d’encre. On peut dès lors envisager d’imprimer des circuits transparents sur un substrat transparent. Grâce au savoir-faire et à l’équipement du Coating Competence Center (CCC) de l’Empa, les résultats des deux groupes de recherche ne sont pas restés cantonnés à leurs laboratoires. «Les techniques d’impression développées pour ces projets dérivent d’appareils déjà en usage dans l’industrie», explique Romanyuk. Le transfert de la percée scientifique à la production industrielle de circuits électroniques imprimés pourra ainsi être rapidement assuré.


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