Economies d’énergie et de moyens dans le traitement des eaux

Dubendorf, 28.07.2010 - Les stations d’épuration suisses se situent à un très bon niveau international. Mais l’élimination des matières nutritives véhiculées par des eaux usées est encore particulièrement onéreuse et énergivore. L’Institut suisse de recherche sur l’eau Eawag vient de perfectionner un procédé biologique qui simplifie grandement l’élimination de l’azote dans les liquides sur-nageants et réduit de moitié les coûts de traitement au niveau de cette étape d’épuration.

De nombreuses stations d’épuration (STEP) ont déjà recours à la nouvelle technologie, notamment la station municipale zurichoise de Werdhölzi et les STEP de Niederglatt (ZH) et de Saint-Gall. D’autres stations (Thun, Bilten/GL, Dietikon) utilisent un procédé très similaire distribué par la société allemande  Cyklar-Stulz. Les retours d’expérience sont positifs. Notamment grâce au soutien technique et à l’activité de conseil de l’Eawag, la Suisse occupe actuellement une position de leader dans ce domaine.

  

La clé: combiner bactéries Anammox et floc bactérien

Le secret du nouveau procédé réside tout d’abord dans un processus bactérien découvert il y a une dizaine d’années par l’Eawag et une équipe de chercheurs hollandais: l’oxydation anaérobie de l’ammonium ou Anammox. Les bactéries Anammox sont en mesure de transformer l’ammonium (NH4+) en azote atmosphérique inoffensif sans source secondaire de carbone. Pour que ce processus puisse avoir lieu, une partie de l’ammonium doit tout d’abord être transformé en nitrites en présence d’oxygène. Ces nitrites sont ensuite utilisés par les bactéries pour oxyder l’ammonium restant en azote moléculaire. Jusqu’à présent, les techniques employées reposaient sur une séparation de ces deux étapes, ce qui imposait l’installation de systèmes encombrants et assez difficiles à régler. La solution émergea lorsque l’on s’aperçut que la conversion totale de l’ammonium pouvait être effectuée en une seule étape de procédé grâce aux propriétés particulières des flocs bactériens. En effet la formation d’un floc bactérien dans le bassin Anammox crée une juxtaposition très étroite de zones aérées et de zones dépourvues d’oxygène : l’oxydation aérobie de l’ammonium peut ainsi s’effectuer à la périphérie des flocs d’à peine un millimètre de diamètre tandis que les bactéries Anammox profitent des conditions anoxiques qui règnent en leur sein pour assurer son oxydation anaérobie.

  

De nombreux avantages par rapport aux techniques traditionnelles

Par rapport aux techniques classiques de nitrification/dénitrification, les avantages de l’élimination de l’azote des surnageants de traitement des boues avec les bactéries Anammox sont énormes: tout d’abord, l’aération du bassin peut être diminuée de moitié. D’autre part, aucun ajout de carbone (sous forme de méthanol ou d’acétate par ex.) n’est nécessaire. Ceci permet de réaliser de fortes économies d’énergie, de moyens techniques et de ressources financières puisque les coûts du traitement passent de quatre à deux francs par kilogramme d’azote éliminé. Dans la station zurichoise de Werdhölzi, ces économies représentent environ 500 000 francs par an. D’autre part, le procédé est très efficace: la conversion de plus de 90% de l’ammonium  des eaux de process en azote moléculaire allège la charge à traiter par la station. Elle est donc en mesure d’accueillir davantage de matières organiques apportées au niveau de la digestion anaérobie (déchets de l’industrie agroalimentaire par exemple) et produit alors davantage de biogaz. On se rapproche ainsi de l’un des objectifs à long terme des spécialistes de l’assainissement: faire des STEP non plus des consommateurs d’énergie mais des producteurs ou du moins des systèmes autonomes sur le plan énergétique.

  

Le transfert de connaissances et de technologie fonctionne bien

Adriano Joss, technicien des procédés à l’Eawag, souligne: «Nous ne sommes pas les seuls à avoir travaillé sur le procédé Anammox.» Mais contrairement aux sociétés privées qui cherchent à faire breveter à leur compte un processus qui se déroule également dans la nature, l’institut de recherche du domaine des EPF s’efforce de transmettre son savoir-faire et ses connaissances. Car les ingénieurs et chercheurs impliqués s’entendent sur un point: l’utilisation du procédé Anammox doit se généraliser. Il en va de la durabilité de l’assainissement. «Toutefois», indique Joss, «nous ne savons pas encore tout de la manière exacte dont les processus se déroulent. »  En jouant la carte de la transparence dans la recherche et des échanges d’expérience, on identifie beaucoup plus rapidement les meilleures solutions qu’en se protégeant derrière le secret de fabrication et le dépôt de brevet, affirme le scientifique. Et il est convaincu d’une chose: «Le bon fonctionnement des systèmes et la confiance des utilisateurs dans la nouvelle technique profitent aussi au secteur privé impliqué.»


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Pour plus d’informations: Dr. Adriano Joss, 044 823 54 08, adriano.joss@eawag.ch ou Andri Bryner, service medias Eawag.


Auteur

Eawag: L'Institut de Recherche de l'Eau du Domaine des EPF
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