Cultiver un monde résilient comme sa propre vigne

New York, 21.09.2021 - Allocution de M. le président de la Confédération Guy Parmelin, Chef du Département fédéral de l’économie, de la formation et de la recherche (DEFR). Discours pour le débat général de la 76ème Assemblée générale des Nations Unies. New York, 21 septembre 2021

Seule la version orale fait foi !

Monsieur le Président de l’Assemblée générale,
Monsieur le Secrétaire-général des Nations Unies,
Mesdames et Messieurs les Chefs d’Etat et de gouvernement,
Excellences,
Mesdames et Messieurs,

Pendant l’essentiel de ma vie professionnelle, j’ai été vigneron. La viticulture m’a enseigné la patience, la persévérance et la confiance. Une vigne met des années à croître et à produire. L’amélioration des cépages est une science subtile pour produire les meilleurs vins. Il faut respecter la nature et s’adapter aux conditions naturelles. Pourquoi est-ce que je vous parle de cela ici, dans le sanctuaire des Nations Unies ?

La pandémie de la Covid-19 est un peu à l’image de la grêle ou du gel qui peut soudainement ravager les vignes : imprévue et déstabilisante. Les bons vignerons vivent avec ce risque et savent se relever de tels coups du sort.

La pandémie est une catastrophe humaine, sociale et économique, dont les effets se font également ressentir sur la paix et la sécurité internationales. Nos pensées vont à toutes les victimes, directes et indirectes. Les leçons à tirer de ces développements nous font réaliser qu’il faut anticiper les prochaines crises, nous préparer à y faire face et faire preuve de solidarité afin de bâtir un monde résilient.

Trop souvent, nous nous laissons emporter par des visions à court terme et la perspective de gains rapides. Il nous faut retrouver le sens de l’anticipation et la conscience qu’il y a toujours des coups du sort. Quel sera le prochain ? Les scientifiques nous alertent et identifient les menaces à venir.

Ils nous livrent aussi des informations et des données comme éléments de solution. La bonne gestion de ces données est primordiale. C’est pourquoi la Suisse est fière d’accueillir le prochain Forum mondial des Nations Unies sur les données à Berne en octobre.

Les risques, nous les connaissons, il faut nous y préparer et investir dans la prévention. Il faut se donner les moyens pour y parvenir. La recherche, l’éducation et la formation professionnelle, tout particulièrement celle des filles et des femmes, doivent être au centre afin de développer l’accès au savoir, de promouvoir l’innovation et de rendre l’action possible. Plus largement, l’accès au savoir et au savoir-faire nous donne des clés pour anticiper et préparer notre avenir.

Lorsque la grêle ou le gel frappe, les vignerons suisses s’entraident, ils font appel aux assurances auxquelles ils ont cotisé. Lorsqu’une crise touche des régions entières, voire la planète, la solidarité doit être mondiale et les solutions communes. Les Nations Unies sont le lieu où les connaissances et les ressources sont mises en commun. L’organisation elle-même est une leçon tirée des crises passées.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

Continuons à défendre un multilatéralisme fondé sur des règles. La Suisse œuvre pour une Organisation des Nations Unies efficace et efficiente, et soutient les réformes visant à améliorer la prévention des conflits, à renforcer le système onusien de développement et à moderniser les méthodes de gestion. La Suisse a beaucoup à apporter pour relever les défis auxquels le monde est confronté. Vingt ans après avoir rejoint les Nations Unies, nous sommes prêts à contribuer aux travaux du Conseil de sécurité de l’ONU pour la période 2023/24.

La pandémie de Covid-19 a accentué les tendances protectionnistes existantes et mis en évidence les défis relatifs à la résilience des chaînes de production et d’approvisionnement mondiales. Ainsi des politiques visant à la relocalisation ou au contrôle des investissements ont le vent en poupe.

Avec l’accélération continue de nos processus économiques, rendue possible par l’évolution technologique et la numérisation, nos sociétés sont devenues complexes. Comme les intempéries et incendies de ces derniers mois dans le monde nous l’ont douloureusement rappelé, le fait que le climat soit bouleversé sous l’influence de l’homme est une réalité et son action met aussi sous pression la biodiversité de notre planète.

Les rivalités entre puissances vont en s’aggravant et des conflits armés sévissent sur presque tous les continents. Le droit international humanitaire et les droits de l’homme sont quotidiennement violés, semant aujourd’hui déjà les graines des conflits de demain.

Il est de notre responsabilité de trouver des réponses avant que nous ne soyons au pied du mur. Avec l’Agenda 2030 nous avons déjà le cadre dont nous avons besoin pour parvenir à ce but. Face à ces défis, la Suisse souhaite souligner cinq points :

Premièrement, afin de pouvoir vaincre la pandémie, nous devons nous assurer que la vaccination soit accessible à toutes et tous dans le monde. La Suisse s’engage pour un accès équitable et abordable aux vaccins, traitements et diagnostics. Elle contribue, entre autres, à l’Alliance pour les vaccins et soutient l’initiative COVAX AMC, destinée aux pays à bas et moyen revenus, à la hauteur de 155 millions de dollars (145 millions de francs suisses). Etat-hôte de plusieurs organisations internationales dans le domaine de la santé, dont l’Organisation mondiale de la santé, la Suisse met à disposition des ressources et s’engage pour des réformes qui permettent une action efficace dans ce domaine.

Deuxièmement, la crise a révélé l’interdépendance de nos sociétés modernes et l’importance des chaînes de valeur internationales, notamment pour la prestation de biens essentiels. Nous devons renforcer leur résilience sans recourir à des mesures protectionnistes menaçant la reprise économique mondiale. Le cadre juridique qui préside aux échanges internationaux doit s’atteler à renforcer la sécurité juridique et la prévisibilité aussi en temps de crise. L’Organisation mondiale du commerce a ici un rôle central à jouer.

Troisièmement, l’évolution technologique et la numérisation offrent des solutions à nombre de défis auxquels nous sommes collectivement confrontés. La Suisse travaille étroitement avec le monde universitaire et le secteur privé afin de développer des approches technologiques innovantes pour les projets de développement et de lutte contre la pauvreté. Les risques existent cependant. Le monde virtuel n’est pas une zone de non-droit. Au sein de l’Assemblée générale, la Suisse s’implique pour la promotion d’une conduite étatique responsable et l’application du droit international dans le cyberespace. Elle participe également aux efforts de lutte contre la cybercriminalité. Genève joue un rôle de centre mondial pour la politique numérique et la mise en réseau des acteurs impliqués.

Quatrièmement, prenons le changement climatique au sérieux. Comme le montre le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, les actions humaines peuvent encore déterminer l’évolution du climat à venir. Je serai personnellement présent à la COP26 à Glasgow pour réaffirmer l’engagement suisse à mettre en œuvre, efficacement et de manière uniforme, l’accord sur le climat. Au niveau national, la Suisse s’est engagée à la neutralité climatique d’ici 2050. Elle met en œuvre des initiatives concrètes, avec par exemple la réalisation de projets d’infrastructures favorisant le transfert de la route au rail. J’appelle tous les pays à viser la neutralité climatique au plus tard d’ici 2050 et à soumettre des objectifs climatiques ambitieux pour 2030. De même, la Suisse s’engage pour la préservation de la biodiversité.

Cinquièmement, dans un monde polarisé, il est plus important que jamais de revenir au dialogue. Avec la Genève internationale, la Suisse, fidèle à sa tradition, offre une plateforme neutre, propice aux échanges. Au début de cette année, elle a notamment accueilli le Forum de dialogue politique libyen (le « LPDF »), qui a abouti à la nomination d’une Autorité Exécutive Unifiée - une première pour le pays depuis 2014 - chargée de préparer des élections nationales. La Suisse est très préoccupée par la détresse de la population afghane. Elle salue la conférence humanitaire sur l’Afghanistan convoquée par le Secrétaire-général la semaine dernière à Genève. La Suisse s’efforce également de promouvoir le droit international, y compris humanitaire, pour éviter les conflits ou en réduire les effets. La Suisse est fière d’avoir rédigé son rapport sur la mise en œuvre du droit international humanitaire. J’appelle tous les Etats-membres de l’ONU à en faire de même. De tels rapports permettent aux Etats d’établir un bilan de leurs bonnes pratiques et des défis à surmonter.

Excellences, Mesdames et Messieurs,

La grêle ou le gel continueront à ravager parfois les vignes de mon pays. Notre monde sera encore à l’avenir confronté à des crises.

Donnons-nous seulement les moyens d’y faire face ensemble, dans un esprit de coopération et de solidarité. Mettons-nous au travail en vue d’un monde toujours mieux éduqué, plus innovant, plus résilient et plus juste. Inspirons-nous de l’œuvre éphémère « World in Progress » de l’artiste Saype actuellement exposée sur la pelouse nord. Prenons exemple sur ces deux enfants, qui construisent le monde tel qu’ils l’ont imaginé. Et cultivons ce monde qui est le nôtre comme j’ai appris à prendre soin de ma vigne.


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